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Dr. LULU

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ITW Dr. LULU

@pascalbagot

Détourner la machine à tatouer pour en faire une machine à graver, il fallait bien l’imagination débridée d’un punk-rocker pour accoucher d’une telle idée. Une chose dont ne manque pas le Français Dr. Lulu, tatoueur à Valence, comme de l’esprit pratique nécessaire à son application.

La technique est simple mais encore fallait-il y penser, comment t’y prends-tu ?

Je pars d’un dessin existant, fait à la main sur papier ou sur photoshop, et que j’imprime, comme pour un tatouage. Une fois le dessin mis au propre, je pose dessus une plaque de plexiglas transparent qui va faire office de matrice. Je prends ensuite ma machine à tatouer, généralement une rotative - mais une coil peut faire l’affaire pour du remplissage-, et je décalque mon dessin par transparence. Toujours comme pour un tatouage, je prends des aiguilles fines, plus ou moins grosses selon les effets recherchés. Je n’aime pas jeter, donc j’utilise en priorité mes aiguilles périmées, encore emballées, mais dont la date limite d’utilisation a expiré.

Cette technique qui consiste à graver du plexiglas avec une machine à tatouer a-t-elle un nom ?

Aaaaaaaahh…bsolument pas. Spontanément, là, je ne trouve pas, mais je ne connais personne qui fasse ça. Ceci dit c’est bien possible. Tout est possible.

Graver avec une machine à tatouer possède un caractère aléatoire, comment l’appréhendes-tu ?

Ce qui m’intéresse dans la gravure c’est la surprise. Quand je mets l’encre sur la plaque et que je retire le papier de la plaque pour découvrir le résultat… c’est un peu comme pour le développement d’une photo. J’ai plusieurs degrés de satisfaction avec ce procédé : le fait d’avoir réussi une plaque ; l’encrage et enfin l’impression. Chacune des étapes est un petit plaisir et l’ensemble procure une sorte de satiété artistique, artisanale, difficile.

Le caractère éphémère des plaques est-il un problème pour toi ?

Non, si je voulais vraiment faire une œuvre reproductible à l’infini, je ne ferais pas de la gravure comme celle-ci. Ce qui m’intéresse c’est le côté collector, unique. Car, même si je fais une série d’un même motif, l’impression ne sera jamais la même ; les aspérités, les pressions différentes, etc., de nombreux paramètres vont faire varier le résultat. Grosso modo sur une plaque, je fais 25 tirages ; mais c’est rare que la matrice me permette d’arriver jusque-là en général. Chaque passage de presse atténue la précision du trait, la plaque ayant déjà subi la pression des phases de test.

Tu maîtrises l’ensemble de la chaîne, de la gravure à l’impression, quelle importance cela avait-il ?

C’est fondamental. Si tu ne maîtrises pas le procédé de l’impression, le résultat sera pourri. J’aime le contraste. Un bon tattoo c’est un tattoo contrasté - dans la technique du noir, j’entends. Et dans la gravure on peut avoir des noirs très denses, très voluptueux, profonds. Je voulais obtenir des sensations de matière et donner à ces tirages un effet « à l’ancienne ». Si la technique est nouvelle, je voulais un rendu authentique et que les gens s’interrogent sur son ancienneté. Ca colle avec l’imagerie que j’utilise, référencée, début de siècle. J’ai toujours aimé le style gravure.

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