Spécialisé dans le newschool, le tatoueur russe Azat, originaire de l’Oural, profite à 34 ans d’une vie équilibrée, entre tatouages et van life. Méfiez-vous cependant des apparences, derrière cette décontraction et la cool attitude du tatoueur voyageur se cache un technicien rigoureux et perfectionniste.
Hello Azat, comment viens-tu au newschool ?
Quand j'ai commencé à tatouer, la plupart des artistes qui m'entouraient n'avaient aucune idée que l'on pouvait faire des tatouages dans un seul style. Il s’agissait alors encore de copier des images sur la peau. Tout a changé lorsque j'ai vu les œuvres de Victor Chill. C'était incroyable, sans équivalent, ses dessins étaient fous, avec des émotions crédibles. J’ai été tellement impressionné que j'ai commencé à essayer de traduire cette approche dans mes croquis, à faire ce qui me plaisait, sans objectif ni cadre. Aujourd'hui encore, je procède de cette façon.
C’est donc la grande liberté créative qui t’a plu dans ce style?
Oui, j'adore le fait de travailler sans limite et de faire tout reposer sur mon imagination. Je l'apprécie d’autant plus que, dans le tatouage, en travaillant avec le corps, il faut se fondre dans l'image. J'apprécie également le fait de personnaliser les tatouages, ils doivent avoir une valeur. Celle-ci peut être exprimée de différentes manières. Par les souvenirs que les personnes y mettent, en ce qui me concerne en tant qu'artiste, j’apporte la création d’un motif unique.
Comment procèdes-tu avec ton client ?
Mon objectif principal est de le rendre heureux de porter un tatouage parfait. Dans 90 % des cas, je rencontre un client pour discuter de tous les détails du dessin et réaliser une esquisse préliminaire. J'ai besoin de voir la personne, de lui parler et de comprendre quels traits et caractère donner au tatouage, quelles couleurs je dois utiliser. Pour notre bien à tous les deux, il est important de bien nous comprendre avant de commencer.
Dans quel univers vas-tu chercher ton inspiration ?
J'aime tous ces trucs old-school des jeux vidéo et ces choses de mon enfance. À l’époque, mes cahiers d'école étaient remplis de voitures et de motos. Je dessinais un cube et ensuite, comme un sculpteur, j'en tirais une image. J'ai toujours aimé le thème des voitures et des motos. J'aime aussi le style de tatouage japonais, ils ont atteint une grande compréhension de ce qu'ils faisaient et c'est certainement une source d’inspiration pour moi.
Dessiner de la mécanique, des voitures et des vélos, a-t-il aidé à structurer tes dessins ?
Le problème, c'est que lorsque tu dois dessiner quelque chose avec un effet 3D, il faut penser "en 3D". C'est assez difficile au début. Par exemple, si tu veux faire l'angle droit du corps humain, il faut d'abord dessiner une boîte rectangulaire puis découper plusieurs zones qui correspondent aux éléments du corps humain avant de passer à ses proportions. C'est une technique très populaire qui fonctionne à 100% et intuitivement quand j’étais enfant, je m'y suis beaucoup exercé, assis au fond de la classe.
Qu'est-ce qu'un bon tatouage pour toi ?
Selon moi, il y a quatre points essentiels : 1. La technique. Les contours doivent être lisses et précis, la coloration dense et le dégradé doux. 2. L'alphabet graphique. Personne ne veut un lettrage avec des erreurs grammaticales alors il en va de même pour les connaissances graphiques en matière de dessin. 3. Design et charisme. Il doit y avoir une idée et des émotions dans l'image. 4. L'anatomie. Un corps a sa propre forme et son propre schéma musculaire, il a des zones statiques et dynamiques. Dans la musique, tous les sons fonctionnent ensemble, ils se renforcent et s'accentuent mutuellement pour créer une seule et même composition. Ainsi, les silhouettes et les lignes du tatouage doivent être en harmonie avec le corps.
La nature est un thème que tu sembles aimer traiter en particulier, tu nous en parles ?
Effectivement, les animaux sont mon sujet préféré. Je pense qu’il n’y a rien de nouveau ici, les gens ont toujours représenté des animaux sur les murs des grottes et sur leur corps - les tatouages de lions et de tigres sont toujours un sujet populaire, si tu vois ce que je veux dire. Mais si les postures des animaux sont non seulement dynamiques, l’artiste a lui la possibilité de les placer le plus efficacement possible. Ce que les Japonais ont compris il y a longtemps, il suffit pour cela de regarder les postures de leurs tigres et de leurs dragons. Je peux donc utiliser tout cela dans mon travail lorsque je dessine un animal.
Tu êtes un voyageur passionné par les voyages en van, depuis longtemps?
Oh oui, la "vanlife" a changé ma vie, ce sentiment de conduire un vieux minivan, en jouant du Johnny Cash avec à côté ma femme et mon chien, j'adore ça. C'est ce qui rassemble toutes mes passions : conduire ; passer du temps dehors : cuisiner sur le feu ; faire des choses de ses propres mains et vivre son temps afin de ne pas être tenté de le gaspiller sur les réseaux sociaux.
Il y a des pays dont tu gardes un meilleur souvenir que d’autres ?
En général, je me sens bien partout. J’aime visiter de nouveaux endroits. Je voyage souvent en Europe. L'année dernière, je suis allé à Barcelone pour la première fois et rendre visite à Victor Chill. J’ai vraiment aimé cette ville ! Son ambiance mêlant cultures skateboard et graffiti est incroyable.
Tu évoquais Victor Chill comme une de tes principales influences, il y a d’autres tatoueurs que tu regardes ?
J'essaie de ne pas être influencé par le style d’un autre tatoueur donc je préfère m'inspirer du travail des artistes du numérique et du street art. Laisse-moi donc te donner quelques personnes en dehors de la sphère du tatouage : 1 - Kim Jung Gi (@kimjunggius), qui nous a quitté l'année dernière, mais ses œuvres continuent de vivre et d’inspirer. 2- Mossy Giant (@mossygiant), crée une atmosphère incroyable dans ses œuvres. 3- HRVB (@hrvbtheweird) est à voir absolument. 4- Jovanny (@jovanny_brainmash), un artiste russe de premier plan. 5- Abys (@abys_osmoz), un artiste très proche du tatouage newschool. + IG : delai_dzen
