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Monika Malewska

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Monika Malewska, black mystic

Texte : Stefayako / Photos : Monika Malewska

Alliant techniques du blackwork et mysticisme, Monika Malewska a su trouver son style de prédilection. Elle délivre un univers spirituel fort. Des visages aux yeux vides et des corps dédoublés peuplent sa galaxie imaginaire. Une atmosphère à la fois sombre et psychédélique. Presque inquiétante. Un talent à suivre assurément !

Salut Monika, peux-tu te présenter ?

Bonjour, je m'appelle Monika Malewska et je suis tatoueuse. Je suis architecte de formation mais j'ai commencé à tatouer alors que j'étais encore à l'université. Je suis aussi une passionnée de plantes, je transforme doucement ma maison en jungle. J'aime passer du temps avec mes amis, me promener dans la nature et faire du vélo, surtout dans les bois.

D’où viens-tu ?

J’habite à Katowice, en Pologne, depuis 2015. Je suis née et j'ai grandi dans un petit village à l'est du pays, tout près de la frontière avec la Biélorussie. J'y ai vécu 18 ans de ma vie. Puis j'ai déménagé dans une ville voisine, à Bialistock, où j'ai étudié l'architecture et l'urbanisme pendant 5 ans et où mon aventure avec le tatouage a commencé. Peu après l'obtention de mon diplôme, j'ai décidé de m'installer dans le sud, à Katowice, et c'est là que je vis aujourd'hui. C'était une folle décision car à l'époque je ne connaissais ni cet endroit ni personne ici. Je venais d'obtenir un emploi dans un studio de tatouage, alors j'ai décidé de tout quitter et de partir. Je suppose que l'on n’est jamais sûre quand on change de vie !

Comment es-tu devenue tatoueuse ?

Il s'est écoulé quelques années entre le moment où j'y ai pensé et celui où j'ai fait mon premier tatouage. Quand je me suis lancée, cela a immédiatement pris toute la place dans ma vie. Au début, j'ai accompagné une amie dans un salon de tatouage pour lui tenir la main pendant qu'elle se faisait tatouer. J'étais l'amie maladroite qui reste assise pendant toute la séance sans dire un mot. À la fin, j'étais tellement ravie de tout cela que j'ai réservé une date pour moi. Je ne savais pas vraiment ce que je voulais faire, je savais juste que je voulais ressentir ce que c'était et retourner à cet endroit. Cela ressemble au pire client que l'on puisse avoir. Et j’ai même conçu le tatouage moi-même. J'étais une vraie débutante. Dans mon entourage, les tatouages n'étaient pas quelque chose de populaire, ni même de normal. Après avoir eu mon premier tatouage, je me suis complètement plongée dans le sujet. J'ai commencé à chercher des informations, à suivre de plus en plus de tatoueurs, à découvrir différents styles. Mais c'était tellement rare dans ma communauté que je suis rapidement devenue cette « fille tatouée ». Puis je suis allée à ma première convention de tatouage et ce qui m'a le plus frappée, c'est cette liberté d'expression illimitée, tant dans la création que dans l'apparence. Tous ces gens avaient l'air tellement géniaux et étaient heureux et colorés. J'ai regardé les tatouages qui étaient dans les concours et je suis restée sans voix. J'ai alors su que je voulais faire du tatouage. J'ai toujours voulu créer et j'ai pensé que l'architecture serait une occasion de le faire, mais c'est en fait très technique. Il n'y a pas beaucoup d'architectes qui peuvent s'exprimer de manière réelle et libre, et j'étais consciente que je ne serais jamais l'une de ces architectes car ce n'est pas ma passion. Mon intérêt pour le tatouage m'a fait prendre conscience de cela. Le monde du tatouage m'a fascinée dès le début. Et ce que j'ai vu à la convention a bouleversé mon monde et je ne voyais plus d'autre voie pour moi. Commencer à tatouer était donc plus qu'un nouveau passe-temps. Je savais qu'une sorte de processus interne avait commencé en moi, mais je ne pense pas avoir réalisé à quel point cela allait changer ma vie. J'ai contacté un tatoueur local que j'admire, Konrad Knrd, et il a accepté que je vienne de temps en temps à son studio pour le regarder travailler. C'était l'un des plus grands pas hors de ma zone de confort.

Comment as-tu appris ?

Au tout début, j'ai visité l'un des studios où travaillaient à l'époque Konrad Knrd, Paweł Karczewski et Damian Bak, ce qui m'a permis d'observer leur travail et de poser des questions. En même temps, j'étudiais, je faisais mon mémoire et je travaillais pour gagner de l'argent pour mon premier équipement. C'était un rythme fou, mais j'avais un objectif clair et beaucoup de détermination. Cela a duré quelques mois, je rendais visite aux gars dans leur studio, j'apprenais comment préparer l'endroit, comment le nettoyer, comment garder l'hygiène, quels produits utiliser, etc. Finalement, un ami m'a convaincue de lui faire son premier tatouage. J'ai commencé à tatouer à la maison parce qu'il n'y avait pas de place dans le studio pour une nouvelle personne. À l'époque, j'ai reçu un soutien énorme de la part de mes amis qui me laissaient tatouer leur corps. J'ai transformé une pièce de mon appartement en studio, en veillant à ce que tout soit fait dans des conditions décentes. Je travaillais à la maison, mais je cherchais un bon studio où je pourrais être apprentie, malheureusement sans succès. Il n’y avait que quelques studios de tatouage à Białystok. C'est alors que j'ai trouvé le studio Zmierzloki à Tychy, une ville proche de Katowice, dirigé par les célèbres tatoueurs Oliwia Daszkiewicz et Mateusz Wojtak. Mes parents ont été horrifiés lorsqu'ils ont appris que j'avais abandonné l'architecture pour le tatouage dans une petite ville à l'autre bout du pays. En plus d'Oliwia et de Mateusz, mon nouveau studio était composé de gars qui avaient aussi commencé à faire du tatouage récemment. Nous étions donc tous très complices, passant des heures au studio, dessinant sans cesse, nous aidant les uns les autres. Avoir autour de soi de telles personnes qui échangent leurs connaissances et apprennent les unes des autres est une véritable bénédiction.

Depuis combien de temps tu tatoues ?

J'ai fait mon premier tatouage fin 2014 donc ça fera bientôt 7 ans. C'est fou comme le temps passe vite. 7 ans, c'est suffisant pour apprendre mais je sais qu'il y a encore beaucoup à faire. Tout est une question d'expérience et c'est quelque chose que vous travaillez pendant des années. Ces 7 années ont été folles et ma vie a changé à 180° depuis que j'ai commencé le tatouage donc je suis assez excitée pour ce qui reste à venir.

Parle moi un peu de ton parcours.

Je pense que j'ai commencé à un très bon moment, lorsque le tatouage était florissant en Pologne. Les gens ont commencé à faire des choses que personne n'avait vues auparavant, en utilisant des techniques et des styles différents. Quand j'ai décidé de déménager de Białystok à Katowice, je me suis retrouvée dans le meilleur endroit que je pouvais imaginer, un endroit de rêve pour les tatoueurs. Les clients semblaient tomber amoureux du dotwork à l'époque. C'était quelque chose de nouveau et de frais, ils étaient très conscients des possibilités et ouverts aux projets originaux et intéressants. J'avais donc des clients pour mes créations et je pouvais travailler tout le temps, même si à l'époque je n'étais pas connue sur la scène locale. J'ai toujours pensé que, même au début, lorsque mes compétences en matière de tatouage étaient encore faibles, mes dessins étaient bons et se défendaient. Dès que je me suis sentie à l'aise avec ce que je faisais, j'ai commencé à participer à des conventions de tatouage, non pas en tant qu'invitée mais en tant que tatoueuse. J'ai aussi commencé à faire des guests. Grâce à cela, j'ai construit ma base de clients dans tout le pays. Après deux ans de tatouage, j'ai commencé à aller à l'étranger et c'était la grande étape.

Comment as-tu développé ton style ?

Mon style est en constante évolution et je n'ai pas l'impression de pouvoir m'arrêter dans ma quête pour le moment. Au départ, je suis tombé amoureuse du dotwork dès que je l’ai vu. Je faisais des tatouages simples en utilisant la géométrie, les plantes et les animaux. Avec le temps, j'ai commencé à faire des dessins plus complexes et lorsque je trouvais un motif intéressant, je le dessinais sans cesse, encore et encore. C'est à ce moment-là que mes projets ont commencé à avoir un sens. Ils étaient porteurs d'un message et mes clients l'ont tout de suite ressenti. J'ai observé les solutions qui convenaient à la peau après la cicatrisation et celles qui devaient être modifiées. J'ai prêté attention à la façon dont le tatouage rend sur le corps, à la façon de construire des compositions pour que tout fonctionne ensemble, aux solutions qui sont belles et à celles qui ne fonctionnent pas. La recherche de tatouages japonais traditionnels, la biomécanique, la géométrie, les tatouages tribaux m'ont beaucoup aidée dans ce processus.

Comment as-tu appris à dessiner ?

Je dessine depuis toujours. J'étais une enfant qui faisait les devoirs d’arts plastiques pour les amis. Ma tante était mon idole. Elle peint, dessine et écrit et cela m’a imprégnée dès mon plus jeune âge. Je lisais les livres pour enfants qu'elle avait écrits et illustrés, je regardais ses peintures et ses dessins dans son appartement en rêvant qu'un jour je pourrais moi aussi dessiner aussi joliment. C'était une source d'inspiration et cela m'a montré comment m’exprimer à travers l'art. Au lycée, j'ai commencé à gagner un peu d’argent en dessinant des portraits et des caricatures et, étonnamment, ça a plutôt bien marché. J'ai fait cela pendant presque 6 ans et même si ce n'est pas un art de haut niveau, cela m'a aidée à améliorer mes compétences techniques. Puis j'ai suivi un cours de dessin pour me préparer aux examens d'architecture. Cela a bloqué mon imagination car je redessinais surtout des images réalistes. Je ne me suis débloquée que lorsque j'ai commencé à me plonger dans différents types d'art, à explorer différentes formes d'expression, non conventionnelles, illimitées et libres. Et dessiner tous les jours. Pour être honnête, au début, je détestais ça, mon cerveau était aussi rigide qu'un morceau de bois. Ce n'est qu'avec le temps qu'il a commencé à s'assouplir et à devenir plus flexible. J'avais besoin d'exercices quotidiens pour penser d'une manière différente, pour apprendre à créer quelque chose à partir de rien. Donc, avec suffisamment de détermination et de conscience de ce que l'on fait, il y a de l'espoir pour tout le monde !

Pourquoi n’utilises-tu que de l’encre noire ?

J'utilise des niveaux de gris pour être précise, du greywash et parfois des encres grises ainsi que du noir. Je suis monochromatique car c'est ce qui convient le mieux à mes dessins. J'ai dessiné au crayon la plupart de ma vie, donc travailler de cette façon sur la peau était assez naturel pour moi. Je joue occasionnellement avec les couleurs en peignant et j'ai fait quelques illustrations en couleur, mais honnêtement, je ne me sens bien avec mes tatouages que lorsqu'ils sont en noir et blanc. Ils ont l'air plus mystiques et c'est l'ambiance que je recherche. De plus, le noir est intemporel. J'aime son aspect sur la peau et la façon dont il vieillit.

Comment travailles-tu sur un dessin ?

Si un client me propose un thème et que nous nous sommes mis d'accord sur le motif, je commence par la composition, les bonnes relations entre les éléments. Je pense à la lumière et à la partie du corps sur laquelle elle va se trouver car cela détermine aussi beaucoup de choses. Après avoir préparé la base, je joue avec les symboles et les différents effets. Si je dessine juste pour moi, je cherche d'abord un thème. J'essaie de me mettre dans une sorte de transe, de fermer les yeux et de laisser les images circuler dans ma tête. Parfois, cela ne dure qu'un instant, parfois c'est plus long. Lorsque je m'attarde sur une idée, le même processus se produit sur le papier ou l'iPad : changement, transformation, pour arriver lentement au résultat final. J'aime suivre le courant et voir ce qui se passe en cours de route. Certaines idées vaudront la peine d'être poursuivies, d'autres seront juste pour la pratique ou comme partie du processus. Il m'arrive souvent d'abandonner certaines idées et d'y revenir après un certain temps.

Dis-moi, quelles sont tes principales inspirations ?

J'ai appris à trouver l'inspiration dans différents types d'art et dans le monde qui m'entoure. Parfois, une idée peut être déclenchée par une situation, par quelque chose que je vois, entends ou ressens. Je suis un observatrice qui se concentre sur les petits détails. La nature est une source d'inspiration illimitée pour moi car elle m'aide à faire le vide dans mon esprit. Je suis fascinée par les nuages, les étoiles, le soleil et la lune et je pourrais les regarder pendant des heures. Pour moi, c'est inextricablement lié à la spiritualité, la mienne et celle du monde entier. Le culte astral est un axe majeur des systèmes de croyance dans de nombreux endroits sur terre et ce sujet est une grande source d'inspiration pour moi. Tous les dieux, leur imagerie, les cultes, les rituels sacrés, toute la magie qui les accompagne, la connexion des humains au monde et à ce qui ne peut être vu. Cela m'amène à un autre sujet qui est le monde des rêves et des visions psychédéliques, qui sont indissociables du monde spirituel. J'essaie d'explorer consciemment ces domaines et d'introduire leurs éléments dans mon travail. Ces derniers temps, je m'intéresse aussi de plus en plus à l'art populaire et tribal. Il est d'une grande beauté, parfois brut et simple, parfois complexe et coloré. Cela fait partie de la connaissance des racines. J'ai aussi le privilège d'être entourée de personnes créatives travaillant dans différents domaines de l'art qui m'ont appris à m'exprimer et à sortir des sentiers battus.

Et est-ce que certains peintres t’inspirent ?

Oui, et ils sont nombreux. Je te cite quelques noms : Alphonse Mucha, Stanisław Wyspiański, Maxfield Parrish, Tamara de Lempicka, Ephriam Moses Lilien, Salvador Dali, Erté, George Barbier, Toshi Yoshida, Yuko Shimizu, Eyvind Earle, Hokusai. Ce sont ceux qui ont eu un grand impact sur moi. Face aux peintures, j'essaie de les analyser, de voir comment la composition est construite, comment la lumière fonctionne, quelles sont les connexions entre les éléments. Pour moi, chercher l'inspiration dans l'art c'est stimuler mon esprit à réfléchir et à apprendre de lui.

Est-ce que tes tatouages sont un peu mystiques ?

Oui et j'ai toujours été intéressée par le mysticisme. J'ai trouvé une grande source d'inspiration dans toutes sortes de croyances, des religions aux cultes en passant par les mythes. Je pense qu'à la base de cette fascination, il y a le fait que j'ai grandi en tant que catholique et que la religion était une grande partie de ma vie dans mon enfance. J'ai ressenti très tôt le besoin de rechercher la spiritualité. J'ai vu le côté plus mystique de la religion catholique, certaines de ces choses étaient très magiques pour moi à l'époque et avaient un grand impact sur mon esprit et mon imagination. Cependant, en grandissant, je me suis rendue compte que je n'étais pas d'accord avec de nombreux principes de base de cette religion. J'ai également eu la nette impression qu'elle ressemblait davantage à une institution, peu soucieuse de donner aux gens la connaissance de ce qu'est réellement la spiritualité et le type de pouvoir qui l'accompagne. J'ai commencé à chercher ma propre spiritualité, d'où la fascination pour diverses croyances. Mais certains archétypes sont restés en moi, par exemple mes personnages ont souvent des poses comme dans un tableau sacré, ils ressemblent à des saints. Tu sais, en grandissant à la campagne, je n'ai pas eu d'autres stimulations. Pas de théâtre, pas de musée ou de galerie d'art, pas de concert ou d'autres choses culturelles, à part les voyages scolaires de temps en temps. Même si je ne suis plus catholique, l'influence de l'art sacré dans ma petite enfance a été grande. De l'architecture aux peintures et sculptures, en passant par la musique et les rituels. Tout cela m'a stimulé dès l’enfance et je l'ai naturellement intégré dans mon travail.

Es-tu superstitieuse ?

Oui et non. Je ne tremble pas de peur lorsqu’un chat noir croise mon chemin le vendredi 13. Mais j'aime les superstitions car elles sont fortement liées au symbolisme. C'est indissociable de la croyance. J'aime explorer les vieilles superstitions qui existaient chez les Slaves. Les tatouages étaient symboliques et leur énergie pouvait guider les gens dans leur vie ou les marquer. J'ai décidé d'éviter les symboles et les significations clairement négatifs car je crois vraiment que nous devons être prudents et conscients du type d'énergie que nous mettons sur notre peau. Pour moi, l'intention que l'on a derrière le tatouage est très importante et c'est pourquoi je peux me qualifier de superstitieuse.

Le tatouage est une passion pour toi ?

Oui, ça l'est, sinon je ne pourrais pas le faire. J'ai tellement aimé ça que j'étais prête à changer complètement ma vie. Le tatouage m'a consumée depuis le début et ma passion est aussi devenue mon travail. Et quand la passion rencontre le travail, ce n'est pas toujours rose, pailleté et arc-en-ciel. J'ai eu des hauts et des bas avec le tatouage, surtout quand j'en faisais trop et que je ne gardais pas l'équilibre entre cette activité et mes autres passions. J'étais un bourreau de travail et j'essaie encore de lutter contre cela. Lorsque j'ai commencé à travailler à mon propre rythme et que j'ai pris le temps de me reposer et de m'adonner à d'autres passions, je me suis sentie plus équilibrée, plus inspirée et plus désireuse de dessiner, de créer et de tatouer.

Est-ce que tu t’exprimes à travers d'autres arts ?

Depuis ma plus tendre enfance, mon activité principale est le dessin au crayon et, à un certain moment de ma vie, je me suis fermée à d'autres médias. Ces dernières années ont été un grand tournant pour moi et j'ai commencé à essayer de nouvelles choses. J'ai commencé à peindre et je m'en sers comme excuse pour jouer avec des couleurs et des styles autres que le mien. Je joue aussi un peu avec l'argile, en créant de petites sculptures, des objets utilitaires ou parfaitement inutiles, et je trouve cela très relaxant. Travailler avec des formes spatiales est une toute nouvelle façon de créer pour moi et cela me fascine tellement que je veux m'y consacrer plus activement le moment venu. J'aime aussi prendre des photos avec mon appareil analogique et je le pointe principalement sur mes amis, le ciel ou la nature qui m'entoure. J'essaie de le garder avec moi en permanence. Les photos analogiques ont une âme enchantée. Mon autre grand amour est la poésie et je me suis récemment remise à l'écriture après de nombreuses années d'abandon total. L'écriture m'aide à organiser mes pensées, à ralentir mon esprit. C'est presque comme la méditation, cela demande du silence et de l'immobilité. Cette forme d'expression est la plus proche de mon âme. J'espère qu'à l'avenir, elle dépassera le cadre du tiroir et que je pourrai la partager avec les gens. Nourrir ces passions et créer dans des domaines autres que le tatouage ont apporté beaucoup de fraîcheur à ma vie et m'aide à rester créative.

Quel est selon toi le principal défi du tatouage aujourd'hui en Pologne ?

Au cours de la dernière décennie, la scène polonaise du tatouage a prospéré et, depuis plusieurs années, le marché est progressivement saturé. Le tatouage est entré dans le courant dominant et avec lui le nombre de personnes tatouées a augmenté très rapidement. Malheureusement, il est souvent arrivé que des personnes sans aucune préparation au dessin ou connaissance de l'industrie s'achètent du matériel et commencent à tatouer, ouvrent leur studio. Une telle approche gâche le marché, habitue également les clients au tatouage que vous pouvez obtenir rapidement, à bon marché, mais aussi de qualité très moyenne. Pour moi, si vous voulez mettre quelque chose sur la peau de quelqu'un, vous devez avoir des bases et des compétences en dessin. Cela vient non seulement du respect de la profession, mais surtout du respect du client et de son corps. Outre le manque de préparation technique et de dessin, il y a aussi un manque d'éthique professionnelle, une attitude très lâche envers le client et la profession. Cela se traduit à son tour par l'attitude des clients et le fait qu'ils ne prennent pas non plus les tatoueurs et les rendez-vous au sérieux. La Pologne n'a pas une culture du tatouage fortement enracinée, c'est un domaine relativement jeune dans notre pays, associé principalement à la pègre et au tatouage de prison. Dans les années 90, les tatouages étaient moyens. Autocollants copiés, mauvais portraits, logos de clubs de football, etc. La plupart des tatoueurs n'avaient aucune autre compétence que celle de faire fonctionner la machine. Je dis "la plupart" parce qu'il y a quelques dinosaures qui faisaient de bonnes choses à l'époque, qui avaient de très bonnes capacités de dessin, beaucoup de détermination et qui étaient simplement passionnés. Ce sont eux qui ont créé ce que nous appelons aujourd'hui la scène du tatouage polonais. Mais ce qui s'est passé ces dernières années est tout simplement incroyable. Un sens de l'esthétique est venu au premier plan du tatouage, beaucoup de gens avec une éducation artistique ou des artistes amateurs sont entrés dans l'industrie et ont donné une nouvelle direction. Le tatouage est devenu un art. En Pologne, nous avons beaucoup d'excellents tatoueurs, il suffit de dire quel style de tatouage vous voulez faire et vous trouverez quelqu'un qui est excellent dans ce domaine. En outre, beaucoup de ces personnes créent également dans d'autres domaines, ils peignent, dessinent, sculptent. Cela vaut la peine d'être promu car ces personnes font un très bon travail et franchissent les frontières de l'imagination et de la perception du corps dans le contexte du tatouage. @monika_malewska