Prenez un peu de réalisme et de pop culture, vous mélangez et vous obtenez du « réalisme avant-gardiste ». C’est ainsi que Carolina Caos Avalle définit son travail. Œuvrant au Royale Ink Collective à Voghera au Nord de l’Italie, shop qu’elle a fondé avec son compagnon Stefano Galati, cette trentenaire a pris le temps de parfaire sa technique. Forte de ses années de dessin en tant qu’illustratrice, elle a son créé son propre style de collages pop art aux couleurs saisissantes.
Salut Carolina. Raconte moi. Comment es-tu devenue tatoueuse ?
J'ai étudié la psychologie au lycée, puis j'ai fréquenté l'Institut Européen de Design (IED) à Milan. J’ai ensuite travaillé comme illustratrice de livres et de bandes dessinées pendant un temps. Il y a 10 ans, j’ai rencontré Stefano Galati avec qui je gère le shop depuis 2014. Il était déjà passionné par le monde du tatouage et il m'a transmis ça. Les premières années nous nous sommes concentrés sur le dessin et le graphisme des tatouages. Nous allions voir les conventions et nous regardions les autres tatoueurs. Nous avons commencé comme autodidactes à tatouer le cuir synthétique puis beaucoup d'amis. Ce n’était pas du tout facile d’être autodidactes. Nous avons essayé de beaucoup nous informer, mais ce n'était pas comme maintenant à l’époque. Les vidéos n'étaient pas disponibles et ce monde était encore très fermé. Il faut beaucoup de détermination, de passion et d'humilité. Nous avons encore beaucoup à apprendre et cela ne s'arrête jamais.
Comment as-tu créé et développé ton style actuel ?
Les premières années, j'ai essayé d'apprendre et d'approfondir des styles différents, de beaucoup dessiner et d'étudier les différents tatoueurs. Du japonais au cartoon, du réalisme au old school parfois. De la couleur au noir et blanc, en essayant d'apprendre le plus possible de techniques. J'ai commencé par des petits tatouages, des choses simples, un voltage très bas de la machine et beaucoup de patience. Il me fallait 3-4 heures pour faire un tout petit tatouage ! J’ai fait mon premier tatouage sur Stefano.
Pourquoi appelles-tu ce style du réalisme avant-gardiste ?
Parce que c'est un ensemble de mes études et de mon passé. Le graphisme, l'illustration, les dessins animés et le réalisme s'emboîtent et se mélangent, et dans le chaos, ils trouvent leur ordre. Je m'inspire de tout ce qui m'entoure, de la télévision, des bandes dessinées, des publicités, de l'art, du street art, etc... Tout me donne de l'inspiration pour mes projets. Habituellement pour concevoir mon travail, je demande aux clients de me raconter leur histoire et de m'expliquer ce qu'ils aimeraient exprimer avec le tatouage : un moment particulier de la vie, des expériences, des passions et des humeurs. Avec toutes ces informations, je construis le projet. Cela prend parfois quelques heures, parfois beaucoup plus. Lorsque je rencontre le client, nous analysons le projet et mon interprétation de l'histoire en créant une connexion empathique très profonde... Il me fait confiance, il s'ouvre et je deviens la narratrice et l'illustratrice de sa vie sur sa peau. Parfois se faire tatouer est presque thérapeutique car les gens ont l'occasion de raconter à quelqu'un d'extérieur à leur quotidien des moments difficiles ou douloureux qui les ont marqués d'une manière particulière mais qui font partie de qui ils sont.
Comment trouves-tu ton inspiration ?
J'ai toujours aimé dessiner et peindre depuis mon enfance. C'est devenu un besoin physique pour moi, comme dormir ou manger.
Tu peins aussi. En quoi tes peintures diffèrent de tes tatouages ?
Mes peintures sont très différentes de mes tatouages parce que j'aime expérimenter de nouvelles techniques. Pendant mes années d'école, il m'arrivait de m'enfermer dans ma chambre pendant des jours et de ne rien faire d'autre que de dessiner. En dessinant et en peignant, je transmets mon état d'esprit, souvent tourmenté car je ne suis jamais satisfaite de ce que je fais. J'adore l'illustration pour enfants où je laisse plutôt libre cours au côté plus rêveur et sauvage de moi-même. Cet amour m'a été transmis par ma mère qui, lorsque mes frères et moi étions enfants, nous racontait de nombreux contes de fées et dessinait souvent pour nous. C'est pour cette raison que j'ai repris et approfondi la peinture dans la période où nous étions fermés à cause du covid. J'ai sorti mes pinceaux et j'ai peint après tant d'années, c'était devenu ma nouvelle obsession, jour, nuit, parfois pendant 10-12 heures consécutives. En travaillant je peux difficilement continuer à peindre donc j'ai profité du temps dont nous disposions. C'était une grande satisfaction de recevoir beaucoup de demandes de personnes qui voulaient les acheter. Lorsque cette pandémie sera terminée et que tout reviendra à la normale, j'aimerais faire une exposition.
Tu es sponsorisée par des marques liées au tatouage, peux-tu m'en dire plus ? Quel genre de marques ? Pourquoi utiliser ton image ?
Aujourd'hui je suis sponsorisée par des marques comme Cheyenne, Hustlebutter Killer Ink et Dermalise. Je ne collabore qu'avec des marques valables qui sont à mon avis les meilleures. C’est des produits que j'utilise et que je recommande.
En temps normal, est-ce que les voyages sont importants pour toi ?
J'ai toujours aimé voyager et ce travail me permet de le faire en combinant les deux. Avant la pandémie, j'avais prévu de nombreux voyages que j'ai malheureusement dû annuler. J'espère bientôt pouvoir les reprogrammer. J'aimerais beaucoup pouvoir faire un voyage aux États-Unis pour le travail et les vacances.
Quel est ton meilleur souvenir de tatouage et de voyage ?
J'ai tellement de bons souvenirs. L'un des meilleurs est quand nous sommes allés en Angleterre pour participer au "The Kaos Theory Project" de Ryan Smith. C'était une expérience merveilleuse. Des tatoueurs exceptionnels ont travaillé en collaboration pour créer des tatouages à plusieurs mains. J'ai travaillé et appris à connaître Guido Smith et Giovanni Gta, deux personnes très sympathiques et nous restons parfois en contact. J'ai eu la chance de travailler avec de très bons tatoueurs. Les plus beaux voyages que j'ai fait, hors travail, c’était en Asie, des endroits magnifiques. Depuis que je suis enfant mon rêve était de visiter le Japon, et quand j'ai réussi à y aller c'était un rêve qui s'est réalisé, et c'est un pays merveilleux. J'espère y revenir bientôt... mais le prochain endroit que j'aimerais visiter est le Vietnam. https://www.instagram.com/carolinacaosavalle/