Inkers MAGAZINE - Clint Danroth

>MAGAZINE>Portraits>Clint Danroth

Clint Danroth

Partager

INTERVIEW CLINT DANROTH

@pascalbagot

Depuis son studio Craftsman Tattoo Parlour situé à White Rock au Canada, Clint Danroth perpétue l’héritage d’une école nord-américaine mêlant culture occidentale et imagerie asiatique, dans un style extrêmement dynamique et haut en couleurs.

Peux-tu me parler un peu de toi ? D'où viens-tu ? Quel âge as-tu?

Je m'appelle Clint Danroth, j'ai 47 ans et je suis propriétaire du Craftsman Tattoo Parlour à White Rock B.C. Canada, que j'ai ouvert en 1998. Je tatoue depuis 1995, et j'aime faire des illustrations dynamiques grand format qui empruntent beaucoup à l'influence orientale.

Quand as-tu commencé ?

J'ai commencé à tatouer à l'âge de 20 ans même si je n'ai jamais vraiment fait autre chose pour travailler - à l'origine j'étais à l'université pour faire du journalisme. A cette époque j’ai senti que l'écriture ainsi que l’art, le dessin, étaient d'énormes passions pour moi.

Que s'est-il passé ?

J'ai abandonné l'école à 19 ans, car je ne me voyais pas journaliste et, bien que je dessine depuis l'enfance, je ne voyais pas non plus de carrière dans ce domaine. J'aimais pourtant les tatouages, je m'étais fait tatouer très tôt, à l'âge de 15 ans, et la scène du tatouage à l'époque était très différente... Les motards, les rednecks et les cols bleus étaient les seuls à se faire tatouer. Ils étaient aussi les seuls à faire des tatouages. Il ne me semblait pas possible de pouvoir entrer seul dans ce milieu. Même si j'aimais dessiner à l'époque, je ne faisais pas partie de cette scène et le simple fait de se faire tatouer était une expérience intimidante.

Comment as-tu trouvé ta propre voie ?

Au Canada, à cette époque, en 1994, nous étions en récession et le travail était difficile à trouver. Je vivais seul depuis l'âge de 17 ans et je devais subvenir à mes besoins, ce qui était incroyablement difficile à ce moment là. Donc, après avoir abandonné mes études de journalisme j'ai commencé à dessiner beaucoup plus et j'ai gagné un peu d'argent en dessinant aussi pour des groupes et des boîtes de nuit. Finalement, un tatoueur local a vu mes dessins et comme il avait besoin d'un apprenti il m’a engagé. J'étais époustouflé. Autant te dire que j’ai sauté sur l'occasion.

Quelles étaient tes influences graphiques à l'époque, lisais-tu des bandes dessinées ?

J'ai toujours été attiré par des styles d'illustration plus dynamiques comme les comics, les anime et les artistes des années 70 et 80 comme Frank Frazetta. Le tatouage custom n'était pas très répandu à cette époque, et j'étais de plus en plus frustré du fait que les clients ne me permettaient pas de leur dessiner des œuvres originales. Ils ne voulaient que des flashs. J'ai donc lentement commencé à modifier ces dessins et à être de plus en plus attiré par le travail japonais. Sa fluidité et sa profondeur me parlaient vraiment. Mais dans l'Ouest canadien, le style de vie des motards était dominant dans le tatouage et j'ai pris conscience que la plupart des gars étaient plus intéressés par l’idée d’une posture plutôt que réellement par le style japonais. J’ai fini par découvrir que j'avais un don pour lui et, dans mon coin de pays, ce style a fini par être connu sous le nom de "Greaseball Japanese". Une combinaison de crânes de style motard, de démons, de femmes sexy et d'images japonaises emblématiques.

Comment l’as-tu fait évoluer ?

Au fil des ans, je l'ai constamment travaillé. En essayant d'incorporer le mouvement et le flux dynamique du japonais avec une touche plus occidentale, et au fil des ans, j'ai trouvé d'autres personnes qui le pratiquaient aussi. Beaucoup m'ont influencé. Des géants du tatouage tels que John the Dutchman, Paul "Smiling Buddha" Jeffries et bien sûr le parrain Dave Shore, ont tous joué un rôle important dans mon développement en tant qu'artiste. Mes années de travail chez Dutchman Tattoos m'ont donné le plaisir de travailler avec des pairs étonnants comme Dustin Kroetsch, Rob Hope, Ryan Halter et Jessy Young, qui ont tous créé ce style de tatouage à leur manière. En ce qui concerne mes propres idées derrière l'illustration, j'aime incorporer beaucoup de flux et je crois profondément à l'utilisation de la théorie un tiers / deux tiers, le nombre d'or. Cette idée est une manière mathématique de composer une œuvre d'art mais elle me permet d'utiliser efficacement le poids des lignes ainsi que la théorie des couleurs pour obtenir une composition appropriée. Je crois que cette théorie est une loi universelle et j'essaie de l'utiliser au mieux dans chaque tatouage et chaque œuvre d'art que je crée.

Un de tes clients malheureusement décédé depuis, Chris Wenzel, s'est fait enlever une partie de sa peau après sa mort, une peau qu’il s’était faite tatouée par toi. As-tu eu l'occasion de la voir une fois prélevée et qu’as-tu ressenti en voyant ton travail exposé de cette manière ?

Le tatouage a vraiment amélioré ma vie, il l'a presque sauvée à un moment donné. Il m'a apporté de nombreuses expériences et fait entrer de nombreux personnages dans ma vie. L’une de ces personnes était un travailleur forcené nommé Chris Wenzel. J'ai rencontré Chris il y a des années dans le circuit des conventions et il était vraiment l'un des tatoueurs les plus humbles et les plus travailleurs que j'aie jamais rencontrés. J'ai fini par le tatouer lors d'une de ses visites dans ma boutique, un Oni sur sa cuisse. Malheureusement, Chris est décédé il y a quelques années et, dans le cadre de ses dernières volontés, il avait demandé à sa veuve de faire conserver sa peau. Les tatouages de Chris sont entrés dans le livre Guinness des records comme étant la plus grande surface de peau jamais préservée de cette manière. C’était vraiment une chose incroyable... Je me souviens avoir vu le travail que j'avais fait sur lui, entre autres oeuvres réalisées par d'autres artistes vraiment talentueux, et avoir pensé à quel point c'était fou que quelque chose que je créé puisse durer toute une vie, et à quel point j'étais honoré de le tatouer, d'avoir sa confiance ainsi que celle de tous mes clients pour leur ajouter mes créations pour leur vie. + Instagram : @cdanroth Craftsman Tattoo Parlour 15561 Marine Dr, White Rock, BC V4B 1C9, Canada www.craftmantattoos.com