Avec ses 20 ans de métier et ses nombreux voyages, Lucho Morante, 38 ans est devenu une des figures du lettering dans l’univers du tatouage. Revenons sur le parcours insolite du « Charapa » du tattoo.
Les premières machines. Lucho est originaire d’Iquitos, ville tropicale du nord-est du Pérou. Charapa (petite tortue d’eau douce) est le surnom que l’on donne aux habitants de cette région enfouie dans la jungle. Son intérêt pour le tatouage commence à la fin de son adolescence quand il va se faire tatouer pour la première fois. « le gars tatouait tous les mecs des gangs et bossait avec une machine rotative qu’il s’était bricolé tout seul » nous raconte Lucho « quand je suis rentré chez moi, je voulais démonter la machine à coudre de ma mère pour comprendre comment ça marchait. (rire) » , il finit par se bricoler une machine et commence à encrer ses potes. A cette époque, il était difficile de se procurer une vraie machine « j’essayais toujours d’améliorer mes machines pour qu’elles ressemblent à celles que je voyais dans les magazines, mais je ne savais pas vraiment comment ça marchait et à quoi ça ressemblait. Une fois, un pote qui avait réussi à se procurer une vraie machine me l’a prêtée et je l’ai testée….et je lui ai dit : c’est quoi c’te merde! c’est vraiment trop lourd! (rire) ».
Lucho, maintenant propriétaire de nombreux “tattoo-guns“ professionnels, a depuis, toujours travaillé avec des machines à « coils » ( il existe deux sortes de machine les coils (bobines) qui fonctionnent avec un système d’électro-aimants inspirés des anciennes sonnettes de maison (véridique) et les rotatives avec un moteur électrique rotatif comme dans les anciens « walk-man » ou rasoirs électriques, ce système beaucoup utilisé dans les prisons parce que c’était plus facile à bricoler soi-même, n’était pas de qualité, ni populaire, jusqu’à il y a une dizaine d’année et suite à de nombreuse améliorations et sa simplicité d’utilisation est devenu le plus répandu.). Récemment Lucho a re-tenté une machine rotative, réalisé par un tatoueur, dont il nous a vanté les mérites pour son esthétisme et sa qualité, une « mother tattoo machine ». « Le cadre, le style ça a l’air d’une machine traditionnelle et c’est pour ça que je l’ai achetée, sinon je travaille toujours avec des machines traditionnelles » nous confie-t-il. Pour conclure ce passage un peu technique, Les « coils » sont réputées pour effectuer de plus belles lignes et pour un artiste qui réalise beaucoup de lettering la ligne est très importante.
Le parcours : En 2003, après 3 ou 4 ans de tattoo au Pérou, Lucho décide de partir pour l’Europe. Il s’installe à Tarragona en Espagne, ville balnéaire située à une petite centaine de kilomètres au sud de Barcelone. Il trouve une place de tatoueur dans un salon principalement dédié au « Old School ». Lucho perfectionne sa technique et est heureux de pouvoir travailler dans un shop professionnel. Plutôt Attiré par le « new-school » Il se met en route pour des conventions et des « guest » un peu par-tout en Europe ( guest : tatouer en tant qu’invité sur une courte période, cela permet de voyager et de rencontrer d’autres professionnels, pratique très courante dans le monde du tatouage). C’est à la convention très réputée de Barcelone qu’il fait la rencontre de Dimitri Hk, Safwan, Steph D, et Jee Sayalero, artistes new-school dont il apprécie le travail. Il fera par la suite de nombreux « guest » chez Dimitri Hk à St Germain en Laye (près de Paris en France).
Après de nombreuses années à se balader entre des shops de Tarragona, des guests et des conventions un peu partout en Europe, le « Charapa » ouvre son premier shop « Blessed Garden » près de Tarragona en 2015, puis un second en France à Toulouse. S’en suit des nombreux aller-retour entre les deux villes et il finit par rester uniquement sur Toulouse. La malchance l’oblige à abandonner la boutique de Toulouse suite au rachat de l’immeuble par la ville et c’est reparti pour les « guests » et les kilomètres ! En ce moment, installé principalement chez « People are strange » à Lille, il réfléchit à l’avenir avec l’envie d’ouvrir un nouveau shop peut-être en Bretagne. L’aventure continue.
Le style. Lucho développe au début de sa carrière un attrait pour le new-school (style inspiré de la bande-dessinée et du cartoon) avec parmi ses références des artistes comme Victor Chil, Logan Barracuda, Koan dont il arbore un tatouage sur le torse et ventre subliment encré. Il y a une petite dizaine d’années avec l’arrivée de la mode pour les lettrages et avec son look de gangster chicanos, il commence en plus du new-school à tatouer des “letterings“. « Ils m’ont qualifié de “latino-chicanos“ avec ma tête de sud-américain tatoué, et on m’a demandé plein de letterings » nous raconte-t-il en encadrant son visage entre ses mains. Devenu depuis l’un des spécialistes dans ce style, il crée avec El Carnicero, Fatkush et Feel « original side » le premier collectif de lettering en Europe “Born to script ».
Devenu une pointure dans le style, il nous explique « parfois les gens croient que c’est juste de l’écriture le lettering, on écrit pas, on prend le temps, on trace, on ombre, on tatoue, quoi ! » C’est vrai qu’à ce niveau c’est plus de l’illustration que de l’écriture scolaire. Lucho, avant d’avoir déve-loppé son propre style, s’est inspiré d’artistes qui sont pour lui les plus innovateurs dans ce style: Big Meas, Big Sleeps et d’autres qui ne sont pas tatoueurs comme Dave Smith peintre en lettres et spécialiste de la feuille d’or et aussi Martin Schmetzer autre peintre en lettres talentueux. En 2015, le shop « Blessed garden » qu’il ouvre avec son ami Nono à Toulouse est principalement accès sur le lettering, la déco y était incroyable.
Conclusion Nous demandons à Lucho une petite anecdote pour conclure notre interview et il nous raconte « Il y a quelques années, à Tarragona, je devais me promener avec ma fille et je l’emmène à mon shop. Du coup elle râle un peu quand elle me voit monter mon matériel « tu vas travailler, Papa? » et je lui réponds « Non , c’est toi qui va me tatouer. » et elle m’a fait son premier tattoo un peu stressée à l’âge de 11 ans, c’est un super souvenir. » On lui demande pour finir « autre chose à rajouter? » et il nous répond « J’ai faim ! » (rire) cette conversation a vraiment pris faim. ITW par ATC TATTOO https://www.instagram.com/lucho_morante https://www.instagram.com/luchomorantelettering https://www.facebook.com/comomucholucho https://www.youtube.com/LuchoMorante