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Adrian Rod

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INTERVIEW ADRIAN ROD

@pascalbagot

Fort de dix ans d'expérience dans le tatouage, Adrian Rod, originaire du Venezuela, est déjà, à seulement 35 ans, considéré comme un véritable maître du réalisme. Cette expertise technique, qu'il a développée en autodidacte, s'est affinée au fil des années, notamment grâce à son étude approfondie des grands maîtres de la peinture baroque, dont il a tiré des enseignements précieux sur l'usage de la lumière et son rôle fondamental dans l'art.

Tu as appris le tatouage tout seul, comment cela s'est-il passé pour toi ?

Mon parcours dans le tatouage s'est fait en autodidacte. Depuis mon plus jeune âge, j'ai toujours été attiré par l'art, en particulier le graffiti et le design numérique. Cette passion m'a amené à explorer le tatouage comme une forme d'expression plus permanente et plus personnelle. J'ai commencé à pratiquer avec des amis et, avec le temps, j'ai perfectionné ma technique jusqu'à en faire ma profession.

As-tu suivi une formation artistique ?

Bien que je n'aie pas suivi de formation artistique formelle, j'ai toujours été un fervent étudiant de l'art. J'ai consacré du temps à l'étude d'œuvres classiques et contemporaines, et j'ai pris des cours de peinture avec des professeurs qui ont considérablement influencé mon style et ma technique.

À quoi ressemblait la scène du tatouage au Vénézuela lorsque tu as commencé ?

Lorsque j'ai débuté dans le monde du tatouage, la situation était très différente de celle d'aujourd'hui. Il y avait moins d'accès à l'information et aux ressources, ce qui rendait l'apprentissage plus difficile. Cependant, ce défi m'a poussé à rechercher une communauté plus unie et plus collaborative parmi les artistes.

Comment abordes-tu le réalisme, en copiant ?

En ce qui concerne le réalisme, mon approche va au-delà de la simple copie. Je m'efforce de capturer l'essence et l'émotion du sujet, en interprétant les détails et en jouant avec la lumière, les ombres et les contrastes pour donner vie à l'image sur la peau. Pour moi, plus qu'une simple « ressemblance », il faut transmettre et anatomiser, la composition doit être adaptée au corps, presque comme si la personne était née avec le tatouage. Le contraste n'est pas seulement une question d'ombre et de lumière, il concerne aussi les volumes et les textures. Lorsqu'il y a un bon équilibre entre eux, l'œuvre est plus lisible et plus harmonieuse.

Tu es ensuite venu en Europe avec des objectifs très clairs pour ta carrière, peux-tu nous en parler ?

En m'installant en Europe, j'avais des objectifs clairs : élargir mon horizon artistique, apprendre de différentes cultures et de différents styles, et m'établir sur un marché plus large et plus diversifié. Cette expérience a grandement enrichi ma carrière et m'a sans aucun doute permis de grandir en tant qu'artiste. Sortir de ma zone de confort m'a toujours poussée à aller plus loin et à rester motivée.

Ton travail sur les textures est assez impressionnant, qu'il s'agisse du rendu de la pierre ou des cheveux par exemple. Le secret réside-t-il dans le travail du détail et de la lumière ?

Mon travail sur les textures, qu'il s'agisse de représenter la pierre ou les cheveux, est basé sur une attention méticuleuse aux détails et une compréhension profonde de la manière dont la lumière interagit avec les différentes surfaces. Le secret réside dans l'observation et l'interprétation de ces interactions afin d'obtenir un réalisme percutant. C'est un travail de longue haleine et, en l'exécutant, je me rappelle souvent qu'il faut aller lentement et dans l'ordre pour y parvenir.

Quel rôle joue la peinture dans ton activité artistique ?

La peinture joue un rôle fondamental dans mon activité artistique. Elle m'inspire et m'apporte une base solide en matière de théorie des couleurs, de composition et de techniques que j'applique à mes tatouages.

Quelles sont les périodes spécifiques de la peinture qui t'intéressent ?

Je suis particulièrement attiré par l'art baroque, notamment par des artistes comme Caravaggio, Rubens et Rembrandt. L'intensité émotionnelle et la maîtrise de la lumière et de l'ombre dans leurs œuvres ont profondément influencé mon style.

Où se situe l'équilibre entre la toile du tableau et la peau d'un client ?

L'équilibre entre la toile et la peau du client consiste à adapter les techniques picturales au support vivant et dynamique qu'est la peau. Il est essentiel de prendre en compte la façon dont le corps en mouvement affectera la perception du tatouage et son évolution dans le temps.

La perte d'intensité des couleurs est une autre limite qu'il te reste à surmonter.

La perte d'intensité des couleurs est un défi permanent. Pour l'atténuer, j'utilise des pigments de haute qualité et des techniques qui garantissent une plus grande durabilité. Je réalise presque toujours mes tatouages en deux couches, c'est-à-dire qu'une fois la première séance cicatrisée, je la repasse. Cela me permet de renforcer les détails et de contraster la pièce pour la rendre plus solide et plus durable. En outre, j'informe mes clients sur les soins nécessaires pour maintenir l'éclat du tatouage. En tant qu'artiste, je cherche toujours à progresser. Je participe à des conventions et à des ateliers, et je collabore avec d'autres artistes pour échanger des connaissances et des techniques. Bien que je ne suive pas de cours formels, je pense que l'apprentissage continu est essentiel à l'évolution artistique.

Quels conseils donnerais-tu à ceux qui, comme toi, cherchent à atteindre l'excellence artistique ?

À ceux qui recherchent l'excellence artistique, je conseille la persévérance, le dévouement et une passion inébranlable pour l'art. Il est essentiel d'être ouvert à un apprentissage constant, d'accepter les critiques constructives et de ne jamais cesser d'explorer de nouvelles techniques et de nouveaux styles. La passion et l'amour pour ce que vous faites vous libèrent, mais la constance peut vous mener plus loin. Aujourd'hui, je dois tout au tatouage. + IG : @adrianrodtattoo