Inkers MAGAZINE - Makoto Horimatsu

>MAGAZINE>Portraits>Makoto Horimatsu

Makoto Horimatsu

Partager

ITW MAKOTO HORIMATSU

@pascalbagot

Originaire de Fukuoka, ville située dans le sud du Japon où il habite aujourd’hui, Makoto Horimatsu y découvre le tatouage avant d’embrasser le métier, auquel il se consacre depuis une vingtaine d’années. Influencé par les mangas modernes comme les estampes anciennes, Makoto Horimatsu puise ainsi dans la longue histoire de la culture populaire japonaise l’inspiration nécessaire à ses tatouages « one shot » et ses pièces grand formats.

On a peu l’occasion de parler du tatouage dans le Kyushu, cette grande île dans le sud du Japon, quelle est la situation dans ta ville de Fukuoka ?

La ville accueille moins de touristes que Tokyo ou Osaka et la culture du tatouage n'y est pas aussi avancée.

Y a-t-il des maîtres traditionnels là-bas que nous devrions connaître ?

Je dirais Horiso Tajima d’Oita (@horiso_tajima). Il y a sinon un grand tatoueur japonais new school à Kyushu, il s’appelle King Rat Tattoo (@kingrat222). Ses talents de dessinateur et sa passion pour l'art sont incroyables.

Quel a été ton premier contact avec le tatouage ?

Probablement la première fois qu’un ami s'est fait tatouer. J'aime à penser que ce tatouage n'était pas si mal bien que je ne m’en souvienne pas. Quoi qu'il en soit, l'image négative du Japon ne m'a pas effrayé et j'ai décidé de faire du tatouage mon métier.

Tu as appris le tatouage aux côtés du regretté Koji Ichimaru, un tatoueur japonais de grand talent malheureusement parti trop tôt. Peux-tu nous parler de son influence ?

Son travail est unique, il ne peut pas être facilement imité, mais je veux continuer à parler de lui pour que tout le monde s’en souvienne.

Tu nous parles un peu des références artistiques avec lesquelles tu grandis ?

J'ai regardé beaucoup de mangas quand j’étais enfant puis je les ai imités quand je me suis mis à dessiner. J’aimais tout particulièrement les œuvres d'Akira Toriyama, le créateur du manga Dragon Ball. Grâce à son talent pour dessiner les corps, les poses, les vêtements, agencer les couleurs, il était capable de créer des personnages uniques. Un autre auteur de manga que j’appréciais était Masanori Morita (né en 1966, il a notamment été l'assistant de Tetsuo Hara sur le manga Hokuto no Ken, connu en France sous le titre Ken le Survivant, ndr). Ensuite je suis devenu tatoueur, je devais avoir 21 ou 22 ans. J’ai alors été inspiré par les artistes de l'ukiyoe (terme désignant les estampes japonaises produites entre le 17e et le 19e siècle) et tous les tatoueurs.

L’humour que l’on retrouve dans ton dessin, il vient de là ?

Je n'ai pas d'idée très précise, mais je préfère l'humour aux tatouages effrayants.

Le crapaud est l'un de tes sujets de prédilection, d'où vient ton intérêt pour cet amphibien ?

J'ai commencé à peindre des grenouilles parce que j'aimais Kawanabe Kyosai. Mais, en fait, je ne les aime pas particulièrement. J’aime les animaux en général et particulièrement les œuvres qui ressemblent à des caricatures.

Ton travail se situe entre le pop et le traditionnel. Comment trouver l'équilibre ?

Je garde les motifs modernes et pop auxquels j’associe les arrière-plans traditionnels. Il y a beaucoup d'œuvres pop dans l’ukiyo-e et je trouve qu’elles s'accordent bien avec les tatouages traditionnels. Il serait bon de changer l'image sombre des tatouages chez les Japonais.

Sa perception évolue-t-elle dans le bon sens selon toi ?

La popularité croissante des tatouages est une bonne chose pour nous mais, d'un autre côté, il y a beaucoup de jeunes qui regrettent leur décision après s’être lancé sur un coup de tête ou pour une question de prix. Ce n'est pas bon.

Comment vois-tu la tradition japonaise du tatouage ? Comme un fardeau du passé ou une opportunité pour l'avenir ?

Dans le passé, la longue interdiction des tatouages, qui a duré 75 ans, a donné une mauvaise image de la pratique au Japon. Bien qu’elle ne soit toujours pas bonne, elle évolue malgré tout, petit à petit. Je pense que l'avenir des tatouages au Japon est très prometteur et je suis reconnaissant envers nos prédécesseurs qui les ont conservé pendant l'interdiction.

On peut observer ces dernières années que les gens collectionnent les motifs japonais de la même manière que les amateurs de motifs américains traditionnels. Comment as-tu perçu cette évolution ?

C'est une bonne chose pour nous qu'il y ait davantage de collectionneurs de one-shot wabori (un des termes utilisé pour désigner le tatouage réalisé au Japon, ndr). Les choses ont changé lorsque les tatouages américains « one-shot » sont entrés au Japon il y a une vingtaine d’années et qu’ils ont commencé à être reconnus. Peu de Japonais de plus de 60 ans se sont fait faire des tatouages américains quand ils étaient jeunes. Dans cette tranche d’âge, parmi ceux portant du wabori, nombreux sont à être d'anciens yakuzas. + IG @makoto_horimatsu